Club de la Presse 26/07

mardi 26 juillet 2022

PRIX ECO REPORTAGES 2022

 Dans la Tribune du 7 juillet


Et sur e-TRIBUNE...

Nouveau bio-éthanol et azote : les sujets des 2 lauréates du 11e concours Eco-Reportages

ÉCRIT PAR LAURE OSTWALT

21/07/22

 

Dans le sillage de formations autour du développement durable dispensées à ses adhérents, en 2009 le Club de la presse Drôme-Ardèche a créé, sous l'impulsion de Louisette Gouverne, des prix Eco-Reportages destinés à encourager des journalistes travaillant sur ce thème ô combien prégnant aujourd'hui.

Le 23 juin 2022, le Train Théâtre de Portes-lès-Valence mettait à disposition ses équipements pour la remise des 11e prix. Les deux lauréates n'avaient pu venir dans la Drôme, mais l'assistance a pu échanger en visio avec Marthe Akissi depuis la Côte d'Ivoire et Alexia Eychenne depuis Paris.

Du bio-éthanol à base de manioc

Marthe Akissi est très engagée dans ces questions-là : membre du Réseau des journalistes africains spécialisés développement durable et changement climatique (Africa 21), fondatrice aussi en 2019 de "Bénévoles réparateurs", une ONG qui entend susciter auprès des jeunes l'engagement écocitoyen à travers l'embellissement du cadre de vie des personnes vulnérables et la protection de l'environnement en Côte d'Ivoire.

Pour son média, Radio Côte d'Ivoire (Groupe RTT, Radiodiffusion Télévision Ivoirienne), elle a suivi un jeune entrepreneur qui fabrique du bio-éthanol à partir de déchets de manioc. Depuis la guerre russo-ukrainienne, son invention suscite beaucoup d'intérêt même si elle reste à développer, les autorités ivoiriennes ne souhaitant pas le départ ou la récupération de ce cerveau. Mais il aura fallu le repérage de journalistes (dont Marthe Akissi avec son reportage "Rien ne se perd dans le manioc"), l'action des réseaux sociaux et l'intérêt manifesté par des industriels étrangers.


Deux membres du Club de la presse (présidente et vice-présidente) établissent la liaison avec Louisette Gouverne et les deux lauréates, empêchées de venir au Train Théâtre.

Une enquête au goût d'azote

Alexia Eychenne, pigiste (membre du collectif "Les incorrigibles"), a travaillé, elle, sur le nitrate d'ammonium ("Le dopant des champs", paru dans la confidentielle et néanmoins sérieuse Revue XXI). Tout est parti après l'explosion au port de Beyrouth en août 2020. Le stockage du composé est délicat et périlleux, cela constitue un réel problème, mais ce n'est que la face émergée d'une problématique plus large...

Le nitrate d'ammonium a conduit à la jeune journaliste à l'azote "qui m'a menée aux engrais chimiques, indissociable de l'agriculture intensive et de ses effets néfastes". Cette enquête laisse aussi entendre les voix des agriculteurs et rappelle la révolution des engrais. Alexia Eychenne, au bout de son enquête, conclut que la diminution du recours au nitrate d'ammonium induit la réduction du risque. CQFD.

Marthe et Alexia ont été choisies parmi 33 candidatures d'une grande qualité. Un cru par Orange, CNR et la Région Auvergne-Rhône-Alpes et qui confirme la notoriété du concours Eco-Reportages dans la profession. (1)

Une satire pour réveiller les esprits

Le parrain de l'édition 2022 remettait l'essentiel au centre du débat. Pour Jean-Luc Porquet du Canard Enchaîné (Monsieur Plouf !), la crise majeure de ce début de siècle, c'est le changement climatique et l'effondrement du vivant. Il regrette que la presse ne s'empare pas davantage de ces sujets. Encore que... Mais Jean-Luc Porquet concède que les menaces sont proportionnelles au degré de proximité. Evoquant le cas Morgan Large (cette journaliste inquiétée en Bretagne pour ses enquêtes sur l'industrie agroalimentaire et l'agriculture intensive), il reconnaît que "quand on est au plus près des gens qu'on critique, on a davantage de menaces. Ce qui n'est pas le cas au Canard Enchaîné".

Jean-Luc Porquet était ensuite interrogé par Hélène Margaron, vice-présidente du Club de la presse Drôme-Ardèche, sur son dernier livre, "Le grand procès des animaux" (Eds du Faubourg, dessins de Jacek Wozniak). Une fable satirique au cours de laquelle 8 animaux proches de nous (vipère, arénicole, renard, martinet noir...) doivent défendre leur peau devant un président qui ressemble étrangement à un certain Mr M.

La vision écolo de Jean-Luc Porquet

Jean-Luc Porquet identifiait cinq causes à l'extinction des espèces. Rien de rare, mais c'est toujours bon à rappeler : le réchauffement climatique, l'artificialisation des sols, la surexploitation (des poissons en particulier), la pollution (notamment dû aux pesticides. Alors que les insectes constituent le socle du vivant) et le développement d'espèces invasives, parfois corollaires au déplacement des humains.

Quelles solutions ? "Arrêter d'extraire les énergies fossiles" revendique le journaliste qui en appelle également à des "choix personnels de consommation" (et de citer certains des siens : pas de voiture ni de portable). Il martèle que la décision politique sera primordiale. "Alors que la question écologique a été absente de la campagne présidentielle", Jean-Luc Porquet ne nous rassure guère en stigmatisant le niveau d'éveil de la classe politique française : "Il n'est pas bon, peut-être même plus bas que chez les gens normaux". Clairement il se place dans le groupe des écolos "qui sont des réalistes. On ne peut pas avoir une croissance infinie dans une monde fini. Or la décroissance reste un mot tabou." avance le journaliste qui a pourtant pu en débattre avec plusieurs spectateurs lors de sa séance de dédicaces (rendue possible grâce à la librairie L'oiseau siffleur). Car on ne peut pas dire que ses propos aient fait l'unanimité parmi l'assistance présente au Train Théâtre. La politique est un vaste champ libre à la discussion.

L. O.

(1) Les deux prix sont accessibles sur le site internet du Club de la presse.




Jean-Luc Porquet bien entouré par Hélène et Céline du Club de la presse et Karine Beaugiraud (Soleil Communication), qui a posé de nombreuses questions aux lauréates.